Libéré le 15 mars 2002 après une parodie de
justice
Il était resté
détenu, en dépit de l’arrêt rendu le 10 janvier 2002 par la Cour d’appel de
Lomé annulant les poursuites pour diffamation engagées contre lui par le Premier
ministre .
Le 15 février 2002, la
Chambre d’accusation a infirmé l’ordonnance de mise en liberté
provisoire : La
décision avait été prononcée par le seul
Président, pourtant mis en minorité par les deux autres conseillers
Dans une déclaration datant de 1998,
Maître Yawovi AGBOYIBO, ancien bâtonnier de l'Ordre des Avocats du
Togo de 1987 à 1990, ancien président de l'Union des Barreaux de l'Afrique de
l'Ouest (1995-1997) et Président
national du Comité d’Action pour le Renouveau (CAR – un des principaux partis
d’opposition au Togo)
rendait responsables d'exactions sur les populations de leur région commune des milices qui seraient
entretenues par le premier ministre Agbéyomé Kodjo. Le premier ministre a fait
un procès à Agboyibo qu'il accuse de l'avoir diffamé dans un communiqué ou le
CAR lui impute l'assassinat de Kégbé Koffi le militant du CAR tué en 1998 à
Tométikondji dans la préfecture de Yoto. Pendant donc trois jours que le procès
a duré, les cinquante six avocats de Me Agboyibo ont soulevé des questions de
droit. Il a été condamné à six mois
d'emprisonnement ferme et cent mille francs d'amende Me Agboyibo a été mis en
prison le 03.08.01! Le 10 janvier 2002,la Cour d’appel de Lomé a
rendu un arrêt annulant les poursuites pour diffamation engagées contre lui par
le Premier ministre et ordonnant sa libération. Mais Maître Yawovi AGBOYIBO
est resté détenu.
En effet, le Procureur général s’est opposé à sa libération sous
prétexte de l’existence d’une autre procédure engagée à son encontre – et ce
alors même que le juge d’instruction en charge de cette seconde affaire a rendu
une ordonnance de mise en liberté provisoire le 17 janvier 2002.
Le 15 février 2002, la Chambre d’accusation a infirmé
l’ordonnance de mise en liberté provisoire, au terme d’une audience houleuse.
Au lieu d’être rendue par le collège de la Chambre (trois magistrats), la
décision a été prononcée par le seul Président, pourtant mis en minorité par
les deux autres conseillers. C’est
dans ces conditions qu’à la suite de
nombreux appels, notamment d’Amnesty International, de la FIDH et de l’IDHBB (
Voir Journal des droits de l’homme n° XX1), Yawovi Agboyibo a fait l’objet
d’une libération surprise le 14 mars 2002 ; après six mois et onze jours
de détention, après que le président Gnassingbé Eyadéma - qui exigeait
jusqu’alors que le bâtonnier AGBOYIBO
fasse une demande de grâce en bonne et due forme, ce à quoi ce dernier s'est
toujours refusé - eut demandé "dans un geste d'apaisement" au
ministre de la Justice de demander au Parquet de requérir la libération de
l'opposant. Le cas du
bâtonnier AGBOYIBO illustre parfaitement la difficulté de parvenir à un état de
droit dans certains pays d’Afrique
notamment en garantissant une véritable
indépendance des juges qui en est une des conditions impératives. Son action ne
saurait être réduite à une lutte politicienne. En effet, une commission
d'enquête internationale mixte des Nations unies et de l'Organisation de
l'unité africaine (ONU-OUA) avait conclu dans un rapport, publié en février
2001 à "l'existence d'une situation de violations systématiques des droits
de l'homme au Togo".(Voir notamment sur ce point : AI Index : AFR
57/006/2002).